Le virus responsable

Le virus responsable de l’Hépatite de Rubarth (aussi appelée hépatite contagieuse canine) est un Adénovirus canin de type 1. Il présente une « proximité antigénique » (ressemble fortement) au virus de la toux de chenil. Cette dernière est appelée trachéobronchite infectieuse canine et cause des troubles respiratoires aigus (toux sèche, écoulement nasal, fatigue, pneumonie voire atteinte sévère de l’état général). L’hépatite de Rubarth est tout aussi grave mais les symptômes sont différents, ils seront détaillés ci-dessous.

On dénombre cinq genres au sein de la famille des Adénoviridae, le virus de la maladie de Rubarth est un Mastadénovirus. C’est un virus dit « nu » à ADN : il n’est pas enveloppé et peut donc résister plusieurs jours dans le milieu extérieur (jusqu’à six jours). Il présente deux structures à sa surface qui permettent d’interagir avec les cellules hôtes :

  • Une tête glomérulaire composée d’une fibre reposant sur la protéine de la base du penton
  • Des protéines appelées hexons. Ces protéines de la capside permettent la liaison avec les récepteurs de la cellule : la fibre permet l’attachement du virus à la cellule tandis que la base du penton entre en contact avec le second récepteur cellulaire et provoque l’internalisation du virus dans la cellule par endocytose (le virus est absorbé à l’intérieur de la cellule).

Les modes de contamination

Le virus résiste plusieurs jours dans l’environnement. Il se propage principalement de manière indirecte par les excrétions des chiens contaminés : dans les urines, les crottes, la salive et le milieu extérieur. [1] Il se transmet aussi par voie orale ou nasale directe lorsque deux chiens entrent en contact ou par certains parasites comme les poux et les puces. [2] La transmission verticale de la mère au fœtus est en revanche impossible.

L’infection virale

Le virus pénètre dans l’organisme : il rentre par les amygdales, mais il peut parfois résister au pH acide de l’estomac et rentrer dans le système lymphoïde via les plaques de Peyer (amas de tissu lymphatique dans le revêtement de l’intestin grêle, qui est chargé de combattre les infections intestinales). A partir des amygdales, le virus exploite le système lymphoïde pendant un ou deux jours puis rejoint le système sanguin, entraînant ainsi une virémie de quelques jours (entre le troisième jour et le cinquième jour, le virus circule dans le sang). Le virus se multiplie dans le plasma mais aussi dans la moelle osseuse et la rate. La multiplication du virus s’amplifie dans les cellules des endothéliums, puis à partir du cinquième jour, le virus infecte tous les tissus dont le foie, les poumons, les yeux et surtout les reins, d’où une excrétion dans l’urine.

Le virus continue aussi de se multiplier dans les cellules endothéliales par lesquelles il est particulièrement attiré.

L’évolution de l’infection dépend de la réponse immunitaire de l’individu : si la réponse immunitaire est efficace, le chien guérit en une grosse semaine. Si la réponse immunitaire est insuffisante, le chien peut devenir infecté chronique : le virus persiste dans les reins jusqu’à 6 mois, puis l’animal meurt, ou alors le virus peut entraîner rapidement sa mort, sans infection chronique.

Les symptômes et les lésions causés par le virus

Les symptômes surviennent trois à six jours après l’infection. Ils varient selon la gravité de l’infection et la réponse immunitaire. Le premier à apparaître est de la fièvre accompagnée d’abattement, puis une inflammation des amygdales, une baisse d’appétit, une douleur abdominale avec une atteinte hépatique (du foie), des vomissements et de la diarrhée ainsi qu’une conjonctivite et un « œil bleu » (présence d’une uvéite et d’un œdème cornéen), parfois des signes neurologiques s’il y a une lésion de vascularisation cérébrale…
Certains chiens présentent une forme « atténuée » qui dure deux semaines avec des signes cliniques frustres (fièvre, symptômes digestifs et oculaires légers) mais ils restent excréteurs du virus et dangereux pour les autres chiens. Il existe également une forme chronique dans laquelle les virus se multiplient au niveau de différents organes comme le foie ou les reins, se traduisant par une cirrhose (stade avancé de destruction du foie) avec apparition de liquide abdominal (ascite), perte de poids, insuffisance rénale…[2]

Les lésions observées par le vétérinaire sont de l’ordre hépatique et hémorragique (pétéchies sur la peau et ecchymoses) à cause de troubles de la coagulation (l’atteinte du foie bouleverse ses fonctions : il est chargé de fabriquer les facteurs de coagulation), ainsi qu’une augmentation de taille des amygdales, du foie et de la rate.

La mise en évidence de l’infection

Le diagnostic clinique repose sur la présence des différents symptômes décrits précédemment, ainsi que sur l’observation des lésions associées. Pour mettre en évidence le virus (par envoi d’une PCR au laboratoire) le vétérinaire effectue des prélèvements de sécrétions nasales, sang ou urine. Il peut aussi tenter de rechercher les anticorps sur sérum. Dans le cas d’un animal en bonne santé, on réalise un dépistage par sérologie mais il existe des interférences entre la vaccination et le dépistage, c’est à dire qu’un animal malade et un animal correctement vacciné auront tous les deux un résultat positif au test.

Le traitement

Malheureusement, il n’existe pas de traitement spécifique contre l’infection par ce virus. Le vétérinaire pourra essayer d’aider et de soulager l’animal en mettant en place un traitement symptomatique (perfusion, anti-vomitif, antidiarrhéique, traitement oculaire…).

Les moyens de prévention

La vaccination est le moyen le plus efficace pour prévenir la maladie : elle peut être proposée à tous les chiens dès leurs deux mois. La primovaccination comporte une première injection à deux mois puis une seconde injection à trois mois et une dernière à quatre mois. Le rappel est ensuite la première année puis tous les trois ans.

Le vaccin est combiné à la composante virale de la toux de chenil, il protège donc aussi contre cette maladie. Il est systématiquement associé à celui de la maladie de la Carré car il n’existe pas de vaccin monovalent contre l’hépatite de Rubarth. Il peut bien sûr être combiné avec les vaccins contre la parvovirose, la leptospirose, la rage…

Chez les éleveurs de chiens, il est recommandé de vacciner de manière synchronisée les reproducteurs tous les trois ans. Les chiots doivent être vaccinés à huit et douze et seize semaines d’âge comme dit précédemment. S’il existe des malades au sein de l’élevage, il vaut mieux les vacciner à sept, neuf et douze semaines pour lutter contre l’infection pendant la période critique, ainsi que réaliser une désinfection très régulière des locaux et d’isoler les malades. Cette maladie est en effet surtout létale chez les chiots qui ont une immunité plus faible que les adultes et qui ont moins de réserves.

A noter que l’hépatite de Rubarth est une maladie considérée « vice rédhibitoire » : si un animal est vendu alors qu’il était porteur du virus au moment de la vente, celle-ci peut être annulée (un recours en justice est possible pour se faire rembourser par exemple). Le délai pour établir un diagnostic de suspicion est de six jours, et le délai d’action en rédhibition est de trente jours [3].

Bibliographie

[1] Vetopedia – 2022, Hépatite de Rubarth 

[2] Vétodôme – 2022, https://www.vetodome.fr/publication/show.aspx?item=1151  

[3] S. Lecocq – Thèse sur les affections juvéniles du chien : application au diagnostic raisonné du 15ème jour au 3ème mois, 2007. ENVL.